Le combat de Jugurtha

C'est en l'an -109 que Rome connut l'humiliation d'être tenue en échec par un roi "barbare" d'Afrique, Jugurtha.
Jugurtha était le petit-neveu de Massinissa, roi de Numidie, allié et protégé de Rome. Il avait reçu en héritage une partie de ce royaume - l'Algérie actuelle - mais, comme il était ambitieux et rusé, il entreprit d'enlever le reste à ses cousins, petit-fils de Massinissa.
Il fit notamment assassiner l'un d'eux.
Sur la plainte de l'autre, le Sénat intervint. Les commisaires qu'il envoya en Afrique furent achetés par Jugurtha et lui donnèrent raison. Jugurtha continua de s'agrandir, massacra son rival, massacra même des négociants romains et Rome dut lui faire la guerre.
Il acheta alors le consul envoyé contre lui. Cité à comparaître à Rome, il osa venir et acheta un tribun, qui prit la parole pour le disculper.
"Ville à vendre, s'écria-t-il en partant, il ne manque qu'un acheteur !"
De retour en Afrique, il réussit à cerner l'armée romaine et l'obligea à capituler ( -109).

Le scandale fut si grand que le Sénat dut prendre des mesures énergiques. Il confia la direction de la guerre à Metellus, patricien réputé pour son intégrité et ses talents militaires. Bien secondé par son lieutenant Marius, Metellus remporta de grands succès. Mais Jugurtha restait insaisissable et la campagne traînait.
Il fut réservé à Marius de la terminer.

Caius Marius était né en - 155 à Arpinum, dans le Latium, d'une famille aisée de citoyens romains.
Il s'était distingué au siège de Numance et y avait gagné l'estime de quelques nobles qui s'intéressèrent à lui bien qu'il ne fut pas de leur caste.
Il devint tribun, préteur, propréteur en Espagne et, à son retour, fit un riche mariage dans la famille des Julii, l'une des plus anciennes de Rome. Peu après, Metellus l'emmena comme légat en Afrique.

En Afrique, Marius se montra excellent officier, très aimé des soldats dont il partageait toutes les fatigues. Mais, sous des manières simples, rudes et toutes militaires, il cachait une ambition ardente.
En l'an -108, il demanda à Metellus l'autorisation d'aller à Rome briguer leconsulat.
Metellus, choqué de cette prétention de la part d'un homme qui n'était pas noble, refusa d'abord en termes d'une ironie méprisante.
Il céda finalement, mais à la dernière limite. Plein de rancune contre la noblesse, Marius se tourna alors du côté du parti populaire : il fut élu consul pour l'année -107 et, malgré le Sénat, il obtint de remplacer Metellus à la tête de l'armée d'Afrique.

L'historien Salluste raconte en quelques termes Marius harangua le peuple:

Et maintenant, Romains, à ces patriciens superbes, comparez Marius, homme nouveau. Ce qu'ils entendent raconter, ce qu'ils lisent, moi je l'ai vu, je l'ai fait moi-même ; ce qu'ils apprennent dans des livres, moi je l'ai appris dans les camps...
Chaque fois, pour ainsi dire, qu'ils prennent la parole soit devant vous, soit au sénat, ils n'ont à la bouche que l'éloge de leurs ancêtres ; comme si, en rappelant les belles actions de ces grands hommes, ils se faisaient eux-même plus illustres ! 
C'est juste le contraire ; plus la vie des uns eut d'éclat, plus la nullité des autres est dégradante...
Je ne puis, pour justifier votre confiance, étaler ni les images, ni les triomphes, ni les consulats de mes aieux ; mais s'il le faut je montrerai des javelines, un étendard, des colliers d'honneur, et bien d'autres récompenses militaires ; je montrerai surtout les cicatrices qui sillonnent ma poitrine. 
Ce sont là mes images, c'est là ma noblesse : images, noblesse que je n'ai point, comme eux, recueillies par héritage, mais que j'ai moi-même conquises à force de travaux et de périls !

Avant de reprendre la guerre contre Jugurtha, Marius réforma et réorganisa profondément l'armée, divisant notamment la légion en dix cohortes.
Cependant Jugurtha, avec l'aide de Bocchus, roi de Mauretanie - l'actuel Maroc - avait regagné du terrain.
De retour en Afrique, Marius mena vigoureusement la campagne, traquant l'ennemi sans trêve par le moyen de colonnes légères.
Bocchus, vaincu et découragé, finit par livrer Jugurtha à un des officiers de Marius, le questeur Sylla.

Et Jugurtha termina sa vie, jeté au fond d'un puits par les Romains...
tandis que l'heure de Marius avait sonné !

C'était...le combat perdu de Jugurtha